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10 mars 2012 6 10 /03 /mars /2012 15:36

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" Désormais les jours des dictateurs africains sont comptés ! ", " La peur change de camp ! " Tels étaient quelques uns des titres qui s’affichaient à la "Une" des journaux africains alors que s’écroulaient, sous les coups de boutoir de leurs populations en furie et à la stupeur générale, les régimes tunisiens, égyptiens et libyens. En ce début d’année 2012 s’est commémoré le premier anniversaire du Printemps arabe et pourtant, sur le continent africain, "les dictatures" ne se sont jamais bien portées. Quant à "la peur", elle demeure toujours dans le seul et même "camp", celui des gouvernés. Question : qu’est-ce qui empêche l’effet domino de ces soulèvements observés récemment en Afrique du Nord ?


Les raisons à la base de cette effervescence politique sont connues : chômage chronique des jeunes, arrogance des dirigeants et leur famille, corruption généralisée du système, manque d’alternance politique, manque de confiance dans la classe politique, etc. Ces problèmes se posent non seulement partout ailleurs sur le continent Noir mais souvent avec plus d’acuité qu’ils le furent en Afrique du Nord. En théorie, on se serait attendu que tous les régimes africains, vieux et corrompus s’écroulent les uns après les autres, comme un château de cartes. Mais il n’en fut rien. Les motifs sont variés.


Peur de la répression policière. Tout se passe comme si les dirigeants qui se succèdent en RDC se passaient les uns des autres les recettes relatives à leur maintien au pouvoir. L’une d’elles est la systématique répression policière. Puisque la mauvaise gouvernance semble être le système de gestion local, ce ne sont pas les mécontents qui manquent. Et pourtant il s’observe une panne de la mobilisation de la rue. Mais pour Valentin Mubake de l’UDPS, la raison n’est pas à chercher loin : " C’est puisqu’à chaque fois que la population manifeste pacifiquement contre le gouvernement, la Police tire à balles réelles et fauche des vies innocentes ". C’est donc la peur de servir de chair à canon aux Forces armées prêtes à étouffer dans l’œuf toute contestation qui empêche toute velléité de revendication politique.


Baisse du niveau de l’enseignement. La relation entre le niveau d’instruction des masses et la prise de conscience politique n’est plus à démontrer. Le peu d’empressement manifesté par les autorités coloniales pour l’instauration  des institutions d’enseignement supérieur  cachait mal l’appréhension de voir arriver une élite  responsable, consciente et politisée, c'est-à-dire revendicative. Si tout était fait pour retarder l’avènement des universités au Congo Belge, par contre d’autres institutions étaient disponibles, telles les écoles d’infirmiers ou d’enseignants, y compris des grands séminaires théologiques.


A présent que les universités sont libéralisées en RDC, plusieurs facteurs expliquent pourquoi elles sont inopérantes : baisse générale du niveau de l’enseignement, absence d’examen d’admission et des bibliothèques, les élèves autant que les étudiants sont surchargés de cours, souvent facultatifs dans d’autres pays, six jours par semaine, accès à l’internet onéreux, les cités universitaires sont un milieu tribalisé et politisé, la paupérisation des congolais fait que les étudiants survivent plus grâce aux mutuelles tribales très présentes dans des universités ; cet esprit d’entraide tribal prépare l’étudiant à être redevable envers la tribu plutôt qu’à son université. La méthode d’enseignement laisse peu de place à la réflexion et accorde la priorité à la mémorisation. La corruption sévit sur les universités pour la même raison qu’elle l’est dans le reste de la société congolaise : à cause de la crise morale majeure que traverse le pays depuis des décennies.


Tous ces facteurs contribuent à faire de l’étudiant congolais un intellectuel douteux, moins équipé pour un travail d’universitaire : sa lecture d’événements est souvent tronquée parce que tribalisée et donc biaisée. Il est "formaté" pour subir les événements plutôt que pour  les anticiper. D’ailleurs ses priorités sont simples : mettre le plus vite possible à une vie cauchemardesque d’étudiant en se concentrant sur ses études… et sur rien d’autre ! Cela ne nous surprend pas de ne pas voir apparaitre aucune de nos universités dans le classement annuel des 100 meilleures universités d’Afrique.


Absence d’un puissant véhicule médiatique. Très populaire dans les pays arabes, la chaine qatarie "Al Jazeera" a joué un rôle de premier plan lors du Printemps arabe. Les événements les plus importants sont présentés en "live" et diffusés en boucle, avec un effet multiplicateur certain. D’autre part, cette chaine est la meilleure tribune d’où s’expriment tous les leaders arabes, qu’ils soient au pouvoir, terroristes ou dans l’opposition. Qu’en est-il de nos media ?


En RDC, seule la radio onusienne  Radio Okapi est celle qui bénéficie d’une couverture large sur l’étendue du pays. Elle est une radio communautaire dont la ligne éditoriale est résumée dans son slogan de "radio impartiale". Quant au reste de media qui présente une autre information que celle officielle, leur audience est très réduite à cause de son rayon d’action limité. Par ailleurs, ils sont régulièrement victimes de multiples interdictions de diffuser de la part du gouvernement.  Quant aux journaux en ligne (d’obédience de l’opposition), ils souffrent des mêmes faiblesses : manque de professionnalisme car ils privilégient le sensationnalisme et sont très partisans. L’internet étant encore un luxe en RDC, l’accès à ces sites est toujours très réduite.


Contrairement à Al Jazeera dont le professionnalisme pousse les journalistes à prendre d’énormes risques, les cas sont rares ou les hommes de media congolais prennent des images (photos ou vidéo) des violations des droits humains dont ils accusent les autorités. Cette carence ne peut qu’arranger la Police Nationale et le Gouvernement qui continuent à se cacher derrière "    l’absence des preuves des accusations "pour continuer à brutaliser impunément les populations civiles.


Absence d’une large classe moyenne. Avec une économie dont tous les clignotants sont au rouge (balance de paiement déficitaire, inflation a deux chiffres, chômage très croissant corruption tentaculaire), plus de 90 % de nos compatriotes vivant la-bas au pays ne font que survivre. Quand on y ajoute la présence d’une classe politique engagée dans une course effrénée vers l’enrichissement illicite, la présence de deux catégories sociales – les riches et les pauvres – s’explique. Entre les deux, les membres de la classe moyenne sont très peu nombreux, la plupart des cadres ne disposant pas de salaires leur permettant de nouer les deux bouts du mois. Puisque Les provisions alimentaires pour des jours difficiles manquent, tenir deux ou trois jours de manif est simplement mission impossible.  (A suivre).

 

 

 

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